Et si nous devenions européens ?

J’ai conscience que cette question, ou plutôt cette invitation, peut paraître étrange et décalée. Mais prenez quelques minutes pour me lire, vous comprendrez où je veux en venir… et où j’espère vous amener, emmener.

Depuis ce matin du 24 juin 2016 nos yeux et nos oreilles sont saturés de discours négatifs sur l’Europe.
Qu’ils soient pour ou contre le «Brexit» (c’est dingue que Cameron ait laissé s’imposer une abréviation symbolisant la défaite pour baptiser « son » référendum) la plupart des commentateurs prédisent au mieux un tremblement de terre, au pire la mort de l’union….

Bon, et alors ?
Reposons le problème : les britanniques (52% d’entre eux en tout cas) décident de quitter une Europe qu’ils ont en bonne partie façonnée depuis 1973 par leurs atermoiements, leur manœuvres pour ralentir et pour vider de sa substance le projet européen. Le Royaume-Uni quitte une Europe ralentie, bloquée par son surpoids et son manque de projets. Une Europe qu’il a contribué à transformer en un machin quasi informe, ingérable et en plus peu sexy.
Je suis admiratif de nos voisins d’outre-manche, fasciné par leur science de la négociation et leur vision égocentrique des rapports économiques internationaux. Égocentrique ou parfois transatlantique, selon qu’ils défendent les intérêts anglo-saxons ou ceux du cousin étoilé…
A ceux qui me croient anglophobe, je répondrais non pas « j’ai d’excellents amis anglais » mais que je suis un éternel amoureux de leur culture, de leur intelligence et de leur humour. En fait, j’ai parfois l’impression que c’est eux qui ne m’aiment pas. Ou du moins, je pense que, comme de nombreux insulaires, ils se méfient de tout ce qui vit pas sur leur angle de terre.

Donc les britanniques quittent le navire européen avant qu’il ne coule mais après l’avoir en partie sabordé. En partie, car ils ne sont pas les seuls. En fait, sur le continent aussi il y a un paquet de neuneus qui, en voulant se tirer une balle dans le pied, ont en plus réussi à faire des trous dans la coque…

Je ne vais pas retracer l’histoire de l’union mais souvenons nous que l’’Europe s’est construite au lendemain de la guerre sur une affirmation (trop souvent répétée) : « plus jamais ça !». L’idée était qu’en cherchant ce qui nous rapproche au moins économiquement, et si possible politiquement, socialement, nous serions moins tentés de nous taper dessus.
Une belle idée, simple mais trop vite oubliée. Les 6 premiers membres décidèrent d’inviter très vite (trop vite) d’autres états à les rejoindre. Au lieu de créer une locomotive capable d’entraîner peu à peu tous les autres, ils tentèrent de faire avancer de front et d’un même pas 9, 12,15… 28 pays ayant des moyens et des visées bien différentes…

Le 24 juin au matin, parce qu’une des pierres de l’édifice tombe, nous pensons que c’est la tour entière qui va s’écrouler (Tour de Babel désormais puisque jusqu’à présent la langue officielle de l’Europe était l’anglais)…

Mais si l’Europe est morte… vive les européens !
Mais oui, les européens convaincus, ces gens qui vivent sur le même continent et qui voudraient transcender leur histoire pour vivre ensemble, en paix et en harmonie.
Il y a 30 ans, l’idéaliste que je suis pensait qu’il vivrait un jour un quotidien de « citoyen européen » : les informations seraient d’abord européennes avant d’être nationales, régionales ou locales, nous aurions une politique étrangère commune, nous élirions un parlement (un vrai) et même un président de l’Europe…. Première étape vers le rêve d’un gamin utopiste d’un gouvernement mondial

Si l’Europe échoue s’est parce qu’elle n’a pas su poser des valeurs d’adhésion (plus que des règles) solides et claires. Elle s’est au contraire modifiée (déformée ?) à chaque fois qu’elle accueillait un nouveau membre.
Ces « vraies valeurs » sont à mon sens celles fondatrices d’une « patrie européenne », basée sur un principe simple: le fédéralisme.
Concept simple mais clivant, je sais.
Simple et peu populaire, parce que peu populiste, je sais.
Minoritaire, dérangeante, la vision d’un abandon de la souveraineté nationale au profit de quelque chose de plus grand (dans tous les sens du terme) est pourtant la seule proposition qui pourrait permettre à l’Europe de sortir par le haut de cette crise et de garantir un avenir moins sombre à nos enfants.

Nous avons aujourd’hui la quasi-certitude que la vie existe ailleurs dans l’univers. A l’échelle de notre petite histoire humaine nous avons grandi socialement et « humainement » en passant de la famille au clan, à la tribu, au peuple, à la nation… Pourquoi nous arrêter en si bon chemin ? Pourquoi revenir en arrière ?

Tenez… Et si tous ceux qui partagent l’espoir d’une nation européenne unie, fédérée, sociale, pacifiste, tolérante et laïque (si si, j’y tiens) se reconnaissaient entre eux et se faisaient connaitre ?
En cette période troublée ou les communautarismes les plus barbares et les plus anachroniques fleurissent ou renaissent, nous pourrions nous compter et porter et défendre ce projet certes idéaliste, peut-être utopiste mais certainement visionnaire.
Le chemin est long, escarpé, accidenté mais cette voie existe. A nous et à nos enfants de la défricher.

Alors je vous réitère mon invitation : et si nous devenions européens ?

PS : pssst… je le dis tout bas pour ne pas effrayer « les autres », mais je viens de découvrir que nous ne sommes pas seuls ! :https://www.facebook.com/mycountryeurope/